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J'étais seule devant ce verre qui appelait ma bouche alors qu'une simple gorgée m'endormirait à jamais. Les quelques cachets posés à côté me regardaient attentivement pendant que j'observais le lent mouvement de ma main qui guidait le contenu du verre en en touchant indifférement les parois. Mes oreilles bourdonnantes interrompaient les quelques idées qui arrivaient dans ma tête pour y laisser le vide qui m'avait poussé à en venir à ce moment d'isolement. Mes jambes tremblantes reflettaient la peur qui envahissait mon corps dans ce passage difficile alors que l'évocation d'un simple mot me donnait le vertige. Je devais en finir. En finir pour ne plus souffrir, pour ne plus avoir honte de ma lâcheté, et pour, peut-être, mourir dignement. Mais n'était-ce pas là un signe de découragement et d'abdication de ma part? Le suicide était peut-être le seul moyen de contrôler sa mort, de la saisir, plus précisement, mais il était aussi probablement synonyme du sommet de ma lâcheté. Car j'avais peur qu'elle me surprenne dans un moment de bonheur. Peur de regretter le fait de ne pas en avoir assez profiter. J'avais peur d'elle, simplement.

Mon esprit se brouilla quelques instants pour laisser apparaître les images de mon passé tant admiré. La balançoire que mes parents avaient acheté, qui me faisait aller d'avant en arrière, le souffle coupé par l'air vif qui emmêlé mes cheveux. Les nombreuses danses qui faisaient voltiger ma jupe dans les soirées organisées par des amis. L'alcool coulant à flot dans ma bouche qui exaltait. Les baisers échangés en cachette sous un arbre alors que la pluie ne s'arrêtait plus. Les courses à vélo dans les descentes de mon village. La musique hurlante qui me rendait ivre de bonheur. Le temps qui filait sans que je ne m'en rende compte. L'allure irrattrapable de la vie qui me faisait tourner la tête. Et le silence, d'un coup. Moi devant ce verre qui ne cessait de me dévisager.

C'est les idées claires que je me suis levée pour jeter ce qui aurait pu me faire trépasser. La mort attendrait bien encore quelques années...