Le grand voyage

Marcher. Ne surtout pas s'arrêter. Continuer droit devant en regardant sur les côtés. Voir le monde à sa droite et le comparer à celui qui se présente à gauche. Garder les yeux rivés sur des gens attentionnés. S'arrêter un peu pour eux tout en continuant à tracer son chemin dans sa tête. Marcher encore et toujours. Se retourner, des fois. Pleurer un bon coup et se remettre au travail. Revenir sur son chemin en essayant de garder les épaules droites. Observer l'environnement. Toujours. Incorporer des choses magiques qui nous font vibrer. Continuer. Encore. Même si la tête n'y est plus, même si le corps ne suit pas. Marcher sur un air de musique. Chanter à haute voix pour ne pas voir le Mal qui nous ronge parfois. Emprunter des chemins crasseux qui ne nous laissent pas indemme, qui nous font avancer bien que l'apparence nous ferait penser le contraire. Reprendre son souffle dans des instants perdus à jamais. Reposer son âme sur des personnes de passage. Repartir encore plus fort ou démolis, sans avoir le droit de donner son avis. Mais avancer quand même. Car il n'y a rien d'autre à faire que d'avancer. Jouir au moment crucial d'une chanson qui nous accompagne. Observer la beauté du monde. Regarder vite sans s'y attarder. Tant de choses sont à notre portée. Marcher jusqu'à cette piscine. Ce dernier arrêt. Penser à ce fou voyage qu'on vient d'accomplir. Aux gens incroyables qui nous ont plus ou moins accompagnés. A tous ces obstacles qu'on a affronté. Arriver devant toute cette eau et se retourner. Revoir encore en un instant tout ce qui nous est arrivé. Et puis plonger de dos les bras écartés. Telle une étoile qui se laisse submerger par l'eau qui prend part de tous les côtés. Fermer les yeux pour encore se rappeler. Sur un air de musique, quitter la vie. Sans pleurer.